49. Je dois être ivre.

Alors que Gu Hai raccompagnait Bai Luo Yin chez lui, Bai Han Qi discutait avec des gens à l’entrée d’une ruelle. Lorsqu’il vit les deux garçons rentrer, il plia son tabouret, des pattes-d’oie au coin de ses yeux rieurs.
– Oh Da Hai. Reste manger ici. Ne pars pas.
Bai Luo Yin jeta un regard oblique à son père, laissant sous-entendre :
Pourquoi tu le laisses manger ici ? Il comprend rien à la courtoisie, si tu lui dis de rester, alors il va le faire.
– Bien sûr ! Puisque Oncle m’invite, il serait impoli de ma part de partir.
Comme prévu !
Les sourcils courroucés, Bai Luo Yin se tourna vers Bai Han Qi.
– C’est Tante Zhou qui cuisine aujourd’hui, ce sera bon.
– Pas la peine de laisser Tante Zhou cuisiner pour lui, tu peux cuisiner toi !
Bai Han Qi était resté scotché une quinzaine de minutes.
Il est en train de me féliciter ou me maudire ?
Quand Gu Hai entra dans la cuisine, Tante Zhou s’affairait avec la pâte, qu’elle roulait de long en large et qu’elle empilait en plusieurs couches sur un plat. Tac, tac, tac… Avec des coups de couteau denses et réguliers, les nouilles étaient toutes coupées de façon uniforme. Elles semblaient même avoir été découpées à la machine et non faites à la main.
– Tante Zhou, vous êtes incroyablement agile avec ce couteau. Vous pratiquez depuis combien de temps ?
Tante Zhou avait un doux sourire.
– Est-ce qu’il y a besoin de pratique ? En cuisinant plus de 20 ans, qui n’en serait pas capable.
– Vous avez besoin de mon aide ?
– Pas besoin, retourne dans ta chambre et fais tes devoirs, j’aurai bientôt fini avec ça.
Gu Hai vit deux concombres sur la planche à découper. Quand il en croqua un bout, il ne put s’empêcher de faire des éloges.
– Tante Zhou, où avez-vous acheté ces concombres ? Ils sont vraiment bons.
– Ce sont des concombres que nous avons plantés chez nous. Tout à l’heure quand nous rentrerons tu pourras en prendre un sac et les donner à tes parents. Nous n’avons pas utilisé de pesticides alors tu peux les manger sans problème.
– D’accord, je viendrai chez vous vous en prendre.
Entre bavardage et rire, Tante Zhou avait fini de couper les concombres. Ils étaient parfaitement émincés et déposés sur une assiette. Juste à côté, il y avait des petits dès de viandes fraîches, frits et marinés dans de la sauce soja. La quantité de légume était aussi conséquente, il y avait des fèves de soja, du cédrèle, des radis… tout rassemblé sur la table donnait une vue appétissante, il suffisait de regarder pour en avoir l’eau à la bouche.
– Tata, vous avez besoin d’un goûteur ?
– T’as pas fini ?
Ses baguettes n’avaient même pas atteint les nouilles, que Gu Hai entendit un cri détonant à la porte arrière.
– Sors et va bosser ! Est-ce que t’es en train de quémander là ?
Tante Zhou regarda le visage de Bai Luo Yin et Gu Hai derrière elle et ne put s’empêcher de se demander :
Pourquoi ces deux garçons sont-ils si adorables ?
Durant le dîner, Gu Hai but le contenu d’une bouteille de bière et mangea tout en discutant joyeusement avec Grand-mère.
Grand-mère Bai s’était trouvée un meilleur ami. Même une fois le dîner terminé, elle ne voulait pas laisser Gu Hai partir. Elle pointa la cour et dit à Gu Hai, excitée:
– C’est camarade Liu Shao Qi qui nous a donné ce lopin de terre pour qu’on cultive. *
– … (GH)
Bai Luo Yin baissa la main de Grand-mère et la persuada gentiment.
– Grand-mère tu devrais aller te laver les pieds. Viens, on rentre à la maison !
Profitant du fait que Bai Luo Yin apparaisse pour prendre du linge pour laver les pieds de Grand-mère, Gu Hai l’arrêta.
– J’ai compris ce que voulait dire ta grand-mère, elle ne veut pas que je m’en aille.
Bai Luo Yin tapota fermement l’épaule de Gu Hai.
– Tu réfléchis trop !
Après avoir fait deux fois le tour de la cour, Gu Hai se dirigea vers la chambre de Grand-mère, puis discrètement regarda la faible lumière à l’intérieur. L’ampoule devait sûrement être utilisée depuis un moment puisque la luminosité était plus faible que le flash d’un téléphone.
Toutefois, quand Gu Hai regardait l’ampoule et les gens sous cette lumière, son cœur se remplissait soudainement de chaleur. C’est ainsi que devrait être un foyer, avec une lumière plus faible que celle de la journée, secrètement défaillante, détirant les ombres des êtres les plus chers sur les murs.
Grand-père but un verre de vin blanc et tomba de sommeil. Ses ronflements arrivaient jusqu’aux oreilles de Gu Hai.
Grand-mère, comme à son habitude, était ronchonne, assise devant son petit-fils qui essuyait patiemment ses pieds.
Gu Hai trouvait parfois Bai Luo Yin très froid et parfois chaleureux.
Il pouvait se montrer distant ou amical avec les gens. Quand il était distant, on penserait que le soleil ne brille plus au-dessus de sa tête. Mais quand il se montrait amical, peu importe les strates de neige accumulées dans votre cœur, il les faisait fondre. Une telle personne, saisit votre état d’esprit à tout moment. Quand vous avancez, il recule, mais lorsque vous reculez, il se retourne en attendant que vous reveniez, de quoi vous en faire perdre la tête. Même en étant tous les deux des hommes et seulement des amis, votre vie devient incomplète quand il n’est pas là.
Mis à part la drogue, Gu Hai ne pouvait trouver aucun autre mot pour décrire Bai Luo Yin.
Quand Bai Luo Yin sortit de la chambre de Grand-mère, les environs étaient déjà calmes, même si on entendait occasionnellement des chiens japper. Tante Zhou était déjà partie et la cour semblait parfaitement en ordre. Derrière la bâche en plastique de la douche, Bai Han Qi se lavait, fatigué.
Bai Luo Yin se dirigea dans sa chambre.
Il n’avait aucune idée de qui avait bien pu éteindre les lumières, mais à peine avait-il mis le pied à l’intérieur qu’il resta sans voix.
Gu Hai avait déjà enlevé ses chaussures et était allongé sur le lit de Bai Luo Yin. La tête reposée sur son oreiller, il s’était couvert avec sa couette et était confortablement couché, sans la moindre gêne.
– Tu ferais mieux de dégager rapidement !
Bai Luo Yin lui asséna des coups de pieds.
Gu Hai marmonna comme somnolent, avec des yeux lumineux.
– J’ai trop bu !
Le visage de Bai Luo Yin s’assombrit.
– Arrête tes conneries ! T’as bu qu’une bouteille de bière, à qui tu veux la faire à l’envers? Vite lève-toi !
– Je peux pas me lever !
– Te fous pas de moi !
Bai Luo Yin se pencha pour tirer Gu Hai mais cet enfant vicieux l’attira sur le lit. Le lit en bois grinça et il encercla ses épaules avant de le renverser sur le lit à l’aide de ses jambes.
Tel un reptile, le regard de Gu Hai serpentait et traînait sur le corps de Bai Luo Yin. Tous les deux collés ensemble, Gu Hai était réticent à lâcher son corps aussi facilement, faisant frémir Bai Luo Yin.
Le corps de Bai Luo Yin était quelque peu raide.
En voyant l’hésitation dans le regard de Bai Luo Yin, Gu Hai laissa sa tête retomber sur son épaule en serrant les dents.
– Je dois être …. vraiment bourré !
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Liu Shao Qi était le Président de la république populaire de chine du 27 avril 59 au 31 octobre 68. Il est aussi célèbre pour avoir été l’un des martyrs de la révolution culturelle.

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